Le télescope spatial de l'Europe se concentre sur les mystères sombres de l'univers.
29 juin 2023
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par Daniel Lawler et Juliette Collen
Le télescope spatial Euclid de l'Europe est prévu pour décoller samedi dans le cadre de la toute première mission visant à éclairer deux des plus grands mystères de l'univers : l'énergie sombre et la matière sombre.
Le lancement est prévu depuis le Cap Canaveral en Floride à 11h11 heure locale (15h11 GMT) sur une fusée Falcon 9 de la société américaine SpaceX.
L'Agence spatiale européenne a été contrainte de se tourner vers la firme concurrente du milliardaire Elon Musk pour lancer la mission après que la Russie a retiré ses fusées Soyouz en réponse aux sanctions liées à la guerre en Ukraine.
Après un voyage spatial d'un mois, Euclid rejoindra son télescope spatial compatriote James Webb à un point d'équilibre stable situé à environ 1,5 million de kilomètres de la Terre, appelé le deuxième point de Lagrange.
De là, Euclid tracera la plus grande carte jamais réalisée de l'univers, englobant jusqu'à deux milliards de galaxies sur plus d'un tiers du ciel.
En captant la lumière qui a mis 10 milliards d'années pour atteindre la Terre, la carte offrira également une nouvelle vision de l'histoire de l'univers âgé de 13,8 milliards d'années.
Les scientifiques espèrent utiliser ces informations pour aborder ce que le chef de projet Euclid, Giuseppe Racca, appelle un « embarras cosmique » : que 95 % de l'univers reste inconnu de l'humanité.
On pense que 70 % sont de l'énergie sombre, le nom donné à la force inconnue qui provoque l'expansion accélérée de l'univers.
Et 25 % est de la matière sombre, censée lier l'univers et représenter environ 80 % de sa masse.
Guadalupe Canas, membre du consortium Euclid, a déclaré lors d'une conférence de presse que le télescope spatial de deux tonnes était un « détective sombre » qui peut en révéler davantage sur ces deux éléments.
Euclid, qui mesure 4,7 mètres de haut et 3,5 mètres de large, utilisera deux instruments scientifiques pour cartographier le ciel.
Sa caméra de lumière visible lui permettra de mesurer la forme des galaxies, tandis que son spectromètre infrarouge proche et son photomètre lui permettront de mesurer leur distance.
Alors comment Euclid essaiera-t-il de repérer des choses qui ne peuvent pas être vues ? En cherchant leur absence.
La lumière provenant de milliards d'années-lumière est légèrement déformée par la masse de la matière visible et sombre le long du chemin, phénomène connu sous le nom de lentilles gravitationnelles faibles.
« En soustrayant la matière visible, nous pouvons calculer la présence de la matière sombre qui se trouve entre les deux », a déclaré Racca à l'AFP.
Bien que cela ne révèle pas la véritable nature de la matière sombre, les scientifiques espèrent que cela permettra de trouver de nouveaux indices qui aideront à la retrouver à l'avenir.
Pour l'énergie sombre, l'astrophysicien français David Elbaz a comparé l'expansion de l'univers à celui d'un ballon avec des lignes dessinées dessus.
En « voyant à quelle vitesse il se gonfle », les scientifiques espèrent mesurer le souffle - ou l'énergie sombre - qui le fait se dilater.
Une différence majeure entre Euclid et les autres télescopes spatiaux réside dans son champ de vision étendu, qui capture une zone équivalente à deux pleines lunes.
Le scientifique du projet, René Laureijs, a déclaré que cette large vue permettrait à Euclid de « surfer sur le ciel et de trouver des objets exotiques », comme les trous noirs que le télescope Webb pourrait ensuite étudier en détail.
Au-delà de l'énergie sombre et de la matière sombre, la carte de l'univers d'Euclid devrait être une « mine d'or pour l'ensemble du domaine de l'astronomie », a déclaré Yannick Mellier, responsable du consortium Euclid.
Les scientifiques espèrent que les données d'Euclid les aideront à en apprendre davantage sur l'évolution des galaxies, des trous noirs et plus encore.
Les premières images devraient être disponibles une fois que les opérations scientifiques commenceront en octobre, avec des sorties de données majeures prévues pour 2025, 2027 et 2030.
La mission d'un montant de 1,4 milliard d'euros (1,5 milliard de dollars) est prévue pour durer jusqu'en 2029, mais elle pourrait se prolonger un peu si tout se passe bien.
Le lancement intervient alors que l'Europe se retrouve avec peu de moyens pour envoyer indépendamment ses missions dans l'espace, en raison de la fin de la coopération avec la Russie l'année dernière et des longs retards du lanceur Ariane 6 de nouvelle génération.
© 2023 AFP